VIVRE AUTREMENT
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Les publications de « La psychologie au pied du mur » n’ont pour objectif que de susciter une réflexion à la lumière de l’aspiration qui nous est commune. ( Voir Page d’accueil )
Deux articles :
– Contre l’empathie
– Empathie, une passion qui tue
à méditer à la lumière de cet autre article :
« LA FORCE SUPRÊME DE L’AMOUR »
» Mais ce que l’on appelle communément amour n’est souvent que séduction, convoitise, soif d’aventures sensuelles et passionnelles ; plaisirs bien éphémères qui, la plupart du temps, cachent un désir de pouvoir personnel, une volonté de posséder et de dominer… et finissent dans l’insatisfaction et la désillusion. «
Contre l’empathie
Paul Bloom
Paul Bloom (né le 24 décembre 1963) est un psychologue américain canadien . Il est professeur de psychologie et de sciences cognitives à l’Université Yale de Brooks et de Suzanne Ragen . Ses recherches explorent comment les enfants et les adultes comprennent le monde physique et social, en mettant l’accent sur le langage , la moralité , la religion , la fiction et l’ art .
Source : Wikipédia
« …l’empathie ( … ) fait en réalité plus de mal que de bien… «
» Il semble par ailleurs que la pratique de la méditation renforce la compassion plutôt que l’empathie. «
2 articles…
Contre l’empathie
Empathie, une passion qui tue
Contre l’empathie
Compte rendu du livre :
Against Empathy. The Case for Rational Compassion, de Paul Bloom, Bodley Head, 2016.
Dans un discours prononcé en 2006, Barack Obama soulignait à quel point il était urgent « de voir le monde à travers les yeux de ceux qui sont différents de nous – l’enfant qui a faim, le sidérurgiste qui a été licencié, la famille qui a tout perdu dans une tempête. Quand vous pensez ainsi – quand vous […] faite preuve d’empathie avec la souffrance des autres, qu’ils soient des amis proches ou des étrangers au loin –, il devient plus difficile de ne pas […] aider ». L’ancien président des États-Unis exprimait ainsi une idée très courante : le monde serait meilleur si tout un chacun faisait preuve d’un surcroit d’empathie. Mais ce n’est pas l’avis de Paul Bloom. Pour ce Professeur de psychologie à l’Université de Yale, l’empathie est au contraire un très mauvais guide pour agir moralement. Elle serait nécessairement biaisée en faveur de nos semblables ou de ceux qui nous ressemblent, aveugle à l’équité et insensible à la misère du plus grand nombre. Au fond, elle serait profondément injuste. Du coup, Bloom lui préfère une compassion rationnelle, c’est-à-dire une forme de souci de l’autre s’accompagnant d’une analyse des coûts et bénéfices de nos actions.
Pour justifier cette position, l’auteur expose les effets négatifs de l’empathie. Le cas typique est celui où, touché par la détresse d’une enfant malade apparue dans les médias, le public fait des dons très généreux pour lui venir en aide et œuvre même pour qu’elle soit soignée en priorité. Le problème est que, pour des raisons d’équité, il serait préférable que les dons soient mieux répartis entre plusieurs enfants ayant autant besoin d’aide et que celle qui est au centre de toutes les attentions ne soit pas prise en charge médicalement avant ceux atteints de maladies plus urgentes à traiter. Mais, dans ce genre de situation, où on se met à la place de celui ou celle dont on perçoit la souffrance, l’émotion l’emporte sur la raison. C’est bien la preuve, estime Bloom, que notre empathie n’est pas bonne conseillère.
Bien sûr, beaucoup rétorquent que ce n’est pas l’empathie qui est en cause ; c’est ce que l’on en fait. Sans elle, nous serions incapables de nous mobiliser pour venir en aide aux autres. La misère et l’injustice du monde ne feraient donc qu’augmenter. Mais Bloom n’est pas d’accord. Enquêtes et expériences de psychologie à l’appui, il montre que les personnes ayant une forte capacité d’empathie ne viennent pas davantage en aide au reste du monde. Une situation dramatique permet d’ailleurs d’illustrer ce rôle secondaire de l’empathie : si un enfant se noie devant nous, ce n’est pas notre capacité à nous mettre à sa place qui nous pousse à lui venir en aide ; c’est plutôt un sens du devoir et de ce qui est juste. Certes, l’empathie peut accompagner de bonnes actions. Mais elle peut aussi – répond Bloom – conduire aux pires exactions. Par exemple, l’empathie pour les victimes d’une atrocité peut conduire à en commettre d’autres à l’encontre de ses supposés responsables. Là encore, certains disent que ce n’est pas l’empathie qui pose problème mais le fait que les protagonistes ne l’étendent pas assez loin. C’est peu crédible rétorque à son tour Bloom. Par sa nature même, l’empathie n’est pas extensible à volonté : on ne peut pas se mettre à la place d’inconnus ou d’individus abstraits. Voilà pourquoi, après avoir répondu à toutes sortes d’objections, il en conclut qu’une froide compassion est préférable à l’empathie. Bref, entre le cœur et la raison, il vaudrait mieux se laisser guider par la seconde…
Thomas Lepeltier,
Sciences Humaines, 293, juin 2017.
Empathie, une passion qui tue
Entretien avec le psychologue Paul Bloom
16 Août 2017, par David MARTIN
D’habitude, on n’a pour elle que des éloges. Mais cette inclination nous mène rarement au meilleur de nous-mêmes et souvent au pire, selon le psychologue Paul Bloom
«L’empathie? Je suis contre», clame Paul Bloom, psychologue canadien installé à l’université de Yale et auteur d’un livre au titre ahurissant: Against Empathy, justement, «Contre l’empathie». Définie comme la tendance à se mettre spontanément dans la peau d’autrui, l’empathie est célébrée quasi universellement comme étant l’un des traits les plus aimables de notre esprit. Selon le chercheur, elle fait en réalité plus de mal que de bien, car elle nous focalise sur les souffrances d’une personne particulière en nous laissant indifférents (ou même en nous rendant hostiles) à toutes les autres. L’empathie serait partiale, bornée, capricieuse, aveugle aux conséquences de nos actes, facile à manipuler pour attiser la haine…
Le Temps: Pourquoi avez-vous appelé votre livre «contre l’empathie» plutôt qu’«au-delà de l’empathie»?
Paul Bloom: Parce qu’on se porterait mieux si on pouvait s’en débarrasser. L’empathie conduit à des jugements biaisés, elle pousse à prendre des mauvaises décisions, elle peut même nous entraîner dans des formes de cruauté. Il y a de nombreux exemples d’atrocités qui ont été fomentées en faisant levier sur l’empathie. Dans l’Allemagne des années 1930, les attaques antisémites étaient encouragées par des récits selon lesquels des Juifs avaient agressé sexuellement des enfants aryens. Dans les Etats-Unis d’aujourd’hui, Donald Trump et d’autres attisent l’hostilité contre les réfugiés en disant: je vais vous raconter une histoire… Et ils vous présentent un récit dans lequel une victime innocente a été tuée par un réfugié. Vraies ou fausses, ces histoires sont faites pour susciter votre empathie à l’égard de la victime et pour catalyser votre colère contre le groupe dénoncé comme l’auteur de ces actes. J’aimerais un monde où on dirait: arrêtez avec ces histoires, elles ne constituent pas une bonne façon de fonder une politique; fournissez-nous des données, des statistiques, des évaluations factuelles… Trump a annoncé, lui, qu’il publierait des listes de crimes commis par des immigrés. On voit bien comment l’empathie peut être convertie en arme.
– Dans le sous-titre, vous annoncez un «Plaidoyer pour la compassion rationnelle». Quelle est la différence?
– L’empathie consiste à ressentir ce que ressent l’autre. La compassion consiste, elle, à se soucier de quelqu’un qui souffre, sans pour autant éprouver soi-même ce qu’il ressent. Des études neuroscientifiques indiquent que cela correspond à deux états cérébraux différents… La compassion a plusieurs avantages. Les gens qui la développent ont plus facilement du plaisir à aider les autres, alors que les personnes très empathiques font souvent des burn-out. A la sortie de mon livre, j’ai commencé à recevoir des messages de médecins, d’infirmiers et de secouristes qui confirmaient cette distinction. Certains d’entre eux en étaient venus à abandonner leur métier parce qu’ils trouvaient trop dur de travailler avec des personnes en souffrance. Ils se demandaient: qu’est-ce qui ne va pas chez moi? Et qu’est-ce qui cloche chez mon collègue qui, lui, ne semble pas affecté? Je crois pour ma part que les meilleurs soignants sont ceux qui se soucient de vous sans ressentir eux-mêmes votre détresse. Si vous suivez une psychothérapie, vous ne voudriez pas voir votre thérapeute s’effondrer quand vous êtes triste. Vous voudriez qu’il ou elle ait à cœur de vous aider, sans refléter vos propres émotions.
– Peut-on s’amener volontairement à éprouver de la compassion plutôt que de l’empathie?
– En établissant la distinction entre ces deux notions dans le langage, on fournit un premier outil. On peut s’entraîner à la compassion, la cultiver, développer une culture qui la valorise et la favorise. Il semble par ailleurs que la pratique de la méditation renforce la compassion plutôt que l’empathie.
– Vous citez votre confrère Martin L. Hoffman, selon lequel un enfant reçoit en moyenne 4000 fois par an des incitations à l’empathie du type: «Comment te sentirais-tu si quelqu’un te faisait la même chose?» L’empathie est-elle innée, ou est-elle le résultat de ce genre d’apprentissage?
– Comme beaucoup de choses, je pense qu’elle est à la fois culturelle et innée. Certaines données suggèrent que l’empathie, comme la compassion, est déjà présente chez les nourrissons. On la rencontre également chez d’autres espèces animales. D’un autre côté, la culture peut l’alimenter et la renforcer, comme c’est le cas pour toutes les émotions. Chaque être humain a la faculté d’éprouver de la colère, mais certaines sociétés sont plus colériques (c’était le cas de mon lycée, où tout le monde hurlait et se tapait dessus…) et d’autres sont plus douces. Les membres d’un groupe humain dont la culture est plutôt débonnaire possèdent, eux aussi, les mécanismes de la colère dans leurs cerveaux, mais ils l’exercent moins que d’autres.
– Avez-vous l’impression que notre culture a «décidé» de renforcer l’empathie?
– Il y a une attitude générale dans la culture occidentale (et en tout cas aux Etats-Unis) selon laquelle les émotions représentent une forme de sagesse: il faudrait toujours écouter son cœur et nos dirigeants devraient être portés par de grands sentiments, quitte à minimiser l’importance de l’intelligence et de la rationalité. Imaginez que, aux Etats-Unis, un candidat dise: j’ai l’intention de prendre mes décisions en déterminant quelles sont les meilleures options, en réfléchissant et en les étudiant en détail… Les gens lui répondraient: nan, on ne veut pas de toi, on veut plutôt une personne avec de gros sentiments. Lorsque Al Gore était candidat à la présidence, en 2000, son équipe de campagne le mettait en garde avant chaque débat: tu as l’air trop intelligent, essaie de ne pas donner l’impression d’en savoir autant…
– Pourquoi sommes-nous donc dotés d’empathie?
– Selon une théorie, l’empathie se serait développée au cours de notre évolution dans le contexte des soins parentaux. La même hormone, l’ocytocine, semble d’ailleurs impliquée dans les deux phénomènes. Il s’agirait là d’un cas de mismatch: une caractéristique adaptée à un contexte évolutif où toutes les relations humaines étaient proches, mais mal adaptée dans le cadre d’une société plus large… Aujourd’hui, l’empathie garde un rôle positif dans les relations intimes, ainsi que dans la littérature, les films, les séries télé: pour apprécier tout cela, il vous faut de l’empathie.
Paul Bloom, « Against Empathy. The Case for Rational Compassion »
Edition Ecco/The Bodley Head.
Source : Le temps
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À l’école Maternelle, à partir de l’histoire « La leçon de Professeur Hibou », les enfants découvrent la voix de leur cœur, de leur conscience.
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